Fini la déco standardisée et uniformisée pour un hôtel ou un restaurant. On mixe le neuf avec le vintage. Certains fournisseurs se sont même spécialisés dans le mobilier recyclé, beau et bon pour la planète.

Notre restaurant se trouve au cœur du quartier Saint-Michel, à Bordeaux (Gironde), à deux pas des antiquaires et de leur marché dominical. Le cuisinier Arthur Vonderheyden a vu cela comme une aubaine pour décorer et aménager La Gigi, la nouvelle adresse qu’il vient d’ouvrir avec Pierre Deleume. Il a ainsi chiné une pléiade de tableaux anciens pour recouvrir les murs, “du sol au plafond”, de l’une des salles du restaurant. “Un matin, devant l’établissement, j’ai même trouvé une table en marbre Roche Bobois vendue 60 €. Je l’ai achetée, bien sûr !” Il aime chiner et fouiner aussi. “J’ai récupéré six pieds de table anciens, suite au dépôt de bilan d’un restaurant, et j’ai fait découper du bois pour fabriquer six plateaux” : c’est comme ça qu’il a eu ses six tables de deux personnes.

Même sens de la récup’ à l’hôtel Saint-Julien à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques). Lorsqu’il en a fait l’acquisition, Julien Kiefer, cofondateur de Ginto Hotels, a conservé tout le mobilier qui pouvait l’être, “afin de garder l’atmosphère de maison de vacances. Le recyclé a le vent en poupe. Parce qu’il donne une âme à un lieu. Parce qu’offrir une deuxième vie à une table en Formica ou à des chaises d’école, ça rappelle des souvenirs et c’est bon pour la planète. Reste qu’un hôtelier ou un restaurateur n’a pas toujours le temps de flâner dans une brocante. Alors certains se sont spécialisés pour dénicher objets et pièces de mobilier, destinés à agrémenter un lobby, donner du cachet à des chambres ou un esprit bistrot à un restaurant.

“Créer des lieux de vraie vie, avec des objets patinés”

“Nous travaillons avec Selency”, confie Solenne Devys, directrice générale adjointe du groupe Okko Hotels. L’idée : “Créer des lieux de vraie vie, avec des objets patinés”, explique-t-elle. Ce que le site Selency permet, en proposant à chacun d’acheter et vendre des pièces de mobilier et de décoration de seconde main. “Nous faisons de l’accessoirisation en chinant des vases, siphons anciens, cendriers, dessins, illustrations…”, reprend Solenne Devys. Mais pour les prochains Okko – dont celui de La Défense (Hauts-de-Seine) attendu en 2022 -, elle compte associer son équipe de décorateurs “pour trouver 20 % du mobilier de l’espace Club de l’hôtel sur Selency”.

De leur côté, les hôtels Greet du groupe Accor ont d’emblée privilégié le recyclé. L’un de leurs fournisseurs de référence, c’est Emmaüs. Mais Greet collabore aussi avec Valdelia, société positionnée sur la collecte et le recyclage des meubles professionnels usagés. “Aujourd’hui, avec des partenaires issus de la fabrication et de la distribution de pièces de mobilier, nous développons le réemploi. Nous accompagnons des projets où les clients recherchent du vintage, de l’upcycling, mais aussi de la qualité, de l’esthétisme et une certaine quantité. Nous sommes là, par exemple, pour aider et conseiller un hôtelier ou un restaurateur en quête de pièces recyclées. S’il n’y en a pas assez pour tout son établissement, nous lui proposons une montée en puissance progressive, en commençant par aménager un lobby ou une réception”, explique Arnaud Humbert, président exécutif de Valdelia, dont le secteur des CHR représente 10 à 15 % de l’activité.

“Investir dans un modèle de matelas neuf, mais éco-conçu”

Quid de la literie ? Peut-on l’acheter aussi sur un marché de seconde main ? Pas vraiment. Respect des normes hôtelières et de l’hygiène obligent. En revanche, on peut avoir un geste éco-solidaire : “Nous incitons les hôteliers à investir dans un modèle de matelas neuf, mais éco-conçu, qui pourra ainsi avoir une seconde vie de lit d’appoint dans le secteur associatif ou hospitalier par exemple. Concernant le cadre de lit, en revanche, nous pouvons trouver du recyclé”, détaille Arnaud Humbert.

Il faut mixer le chiné et le contemporain [lire ci-dessous]”, conclut Solenne Devys. Et ce d’autant que le contemporain en question se met au vert, lui aussi. A l’instar de la Re-Chair, une nouvelle chaise imaginée par le designer Antonio Citterio pour Kartell et composée de matières dérivées de déchets.